Raoul Castex

URL : http://images.mesdiscussions.net/pages14-18/mesimages/3261/CASTEX%20Raoul.jpg

Citation emblématique de Raoul Castex

 

« On peut envisager [la mer] comme un chemin qui réunit plus qu’il ne sépare….c’est la vraie conception, la seule qui permette de rendre un compte exact du rôle de l’élément liquide dans les affaires humaines. L’importance considérable de ce chemin apparait dés le temps de paix, dans l’ordre économique….Tous [ceux qui ont développé les relations de leur pays avec la mer] se sont plus ou moins inspirés du célèbre aphorisme de Walter Raleigh : qui commande la mer, commande le commerce, qui commande le commerce dispose de la richesse du monde, et en conséquence domine le monde lui-même ». « La mission des forces maritimes n’est donc autre que la domination des communications…Réalisant cette situation, on aura obtenue ce que l’on est convenu d’appeler la maîtrise de la mer ». [1]

Présentation de l’auteur

Raoul Victor Patrice Castex, né à Saint-Omer en 1878 et mort à Villeneuve-de-Rivière en 1968, est un officier français et théoricien militaire à l’origine d’une géopolitique française.

Entré dans la marine en 1896, major de l’École navale, professeur à l’École de Guerre Navale, il obtient le grade de contre-amiral en 1928, et les rangs et appellation d’amiral en 1939. Il est fait grand officier de la Légion d’Honneur le 2 juillet 1936. Il termine sa carrière comme commandant des forces maritimes du Nord. Il est le fondateur de l’Institut des hautes études de la défense nationale en 1936, dont il sera le directeur jusqu’en 1939. Sa mission principale est d’aider les cadres de la nation à se forger une perception de la défense, de développer une sensibilité à ses enjeux, de contribuer à l’acquisition de la culture de défense.

Bibliographie

Œuvres de Raoul Castex :

–          Le Grand État-major naval, question militaire d’actualité (1909)

–          Les Idées militaires de la marine du xviiie siècle. De Ruyter à Suffren (1911)

–          L’Envers de la guerre de course. La vérité sur l’enlèvement du convoi de St-Eustache par Lamotte-Picquet (avril-mai 1781) (1912)

–          Synthèse de la guerre sous-marine. De Pontchartrain à Tirpitz (1920)

–          Questions d’état-major. Principes. Organisation. Fonctionnement (1923-1924)

–          Théories stratégiques (1929 ; 1935). Réédition : Economica, 5 volumes, 1997

–          De Gengis-Khan à Staline ou les Vicissitudes d’une manœuvre stratégique, 1205-1935 (1935)

–          L’économie de guerre, André Piatier, préface de l’amiral Castex, 304 p., Collection d’études économiques, tome VII, Librairie générale de droit et de jurisprudence, Paris (1939)

Œuvres sur Raoul Castex :

–          L’Amiral Max Henri Jacques Douguet (1903-1989), le Contre-Amiral Duval et le Général Guillebon, Hommage à l’amiral Raoul Castex, Académie de Marine, Paris, 1968

–          Hervé Coutau-Bégarie Castex, le stratège inconnu, Economica 1985

–          Grand Larousse Universel 2ème semestre 1989.

Problématique

Selon Raoul Castex, il existe un lien entre guerres terrestre et navale, ainsi qu’un “centre de gravité” pour un pays comme la France, qui se situe au-delà des frontières continentales. En quoi, l’union de pays frontaliers ou coloniaux, est une stratégie de domination maritime ?

La France, « placée à l’extrémité d’un continent, d’une masse terrestre, se trouve à cheval entre ce continent et l’océan, entre la terre et la mer. Elle constitue une zone de transition et de départage entre deux mondes différents, entre deux forces, entre deux idéologies, et parfois, un champ de bataille dans les conflits qui les divisent. C’est une sorte de « marche », de région bordière. Cette nation en est fatalement affectée, au double point de vue politique et psychologique. Elle est là en équilibre instable, comme sur une arête de toit, sollicitée logiquement et sentimentalement à la fois, tantôt dans un sens, tantôt dans l’autre, tantôt vers l’infini marin et tantôt vers la frontière ancestrale. Ainsi le veut la géographie ».[2]

Présentation de la problématique et illustration par des faits récents

La place de la France dans la perspective d’une géopolitique maritime active.

         La France est la péninsule de l’Europe comme celle-ci est la péninsule de l’Eurasie ; c’est donc un lieu de pénétration privilégié vers la masse terrestre, qui fait la liaison entre l’océan et l’ouverture vers la mer du Nord d’un côté, la Méditerranée de l’autre ; c’est une terre de pénétration par ses fleuves et ses canaux, en un réseau qui ne demande qu’à être relié au cœur européen danubien par la liaison Rhin/Rhône.

La plus grande distance d’un lieu de France à la mer est de l’ordre de 500 Km, et la population se concentre de plus en plus en zone côtière, aidée en cela il est vrai par une migration de sa composante la plus âgée.

Mais plus encore la France a hérité de son histoire riche d’une forte tradition maritime, à défaut d’une vocation, d’un accès à tous les espaces maritimes du monde ou presque via ses possessions, départements, territoires et pays d’outre-mer, et avec eux de la deuxième plus grande surface de zone économique exclusive du monde.

         L’Europe-Puissance doit donc se lire Europe-Puissance maritime, par l’opportunité historique que représente la sécurisation de la frontière de l’Est, par la nécessité du développement économique européen au sein du phénomène de mondialisation, parce que les menaces viennent d’au-delà des mers et parce que finalement le lien maritime fait partie du véritable socle culturel commun à tous les membres de l’espace intégré.

         Il faut mobiliser la France, convaincre et s’attacher l’Allemagne et la Russie, ne pas compter sur l’Angleterre, et réclamer un passage vers plus d’autonomie stratégique aux Etats-Unis avec le souci du respect des interprétations du moment de la doctrine Monroe.

         Le livre vert européen, par opportunisme environnemental, comme le rapport français du groupe Poséidon, plus visionnaire, permettent d’envisager une transformation et un rassemblement des esprits européens autour d’une géopolitique maritime.

Critique personnelle et argumentée

         La problématique de Raoul Castex s’inscrit parfaitement dans le contexte actuel de  construction d’une géopolitique maritime européenne, cependant cette transformation devient urgente devant certaines menaces du fait de l’immatérialité maritime d’un centre de gravité français comme européen, face à la menace terroriste, puisqu’en empêchant toute frappe irrémédiable au cœur, cette caractéristique prévient tout effondrement du système politique, qui reste le but ultime des guerres asymétriques. De plus, l’utilisation dénaturée de l’Islam comme instrument de « continentalité́ » contre l’individualisme maritime devient un frein massif au développement européen via l’augmentation parallèle de la masse interne des adeptes de la religion musulmane susceptible d’être sensible aux arguments du planisme religieux. On peut également prendre en compte le « péril jaune », qui se traduit surtout par un calendrier trop rapide de bouleversements économiques échappant à la maîtrise politique avant que d’être une menace physique, mais dont l’évolution est inquiétante ; la Russie par le continent, l’Europe par la mer.

         Il est temps de faire mentir partiellement l’analyse jusqu’ici vérifiée de Jacques Bainville : « près de mille ans d’une histoire qui n’est pas finie seront partagés entre la terre et la mer » en choisissant, par l’exemple et l’effort français, de créer un « être européen produit de la volonté et de l’esprit ».

5 mots clés

         Centre de gravité économique, politique et militaire ; Union coloniale, inter-états actuellement ; Contraste terrestre / naval ; Puissance ; Stratégie

Schéma

Initialement dans l’esprit de Castex, A représentait la France, B l’Allemagne et T la Russie : les frontières 1 et 3 permettaient de visualiser les focalisations respectives de la France sur sa frontière Est et le double front inévitable à entretenir pour l’Allemagne dans la perspective d’une continentalisation de son influence. Ce précédent historique doit être présent à l’esprit pour bien saisir la différence fondamentale que l’Europe intégrée et le retour de la Russie dans le concert « classique » des nations vont apporter à la situation vue par Castex.

La perspective d’une Europe politique intégrée, qu’elle qu’en soit la forme, permet en effet d’introduire deux hypothèses : l’atténuation des tensions sécuritaires internes et une logique d’équilibre entre grands ensembles tentés par la volonté́ de puissance, l’Union Européenne et la Russie.

 

Source : Faits et chiffres sur les mers et océans, Commission Européenne, 2006

[1]  Castex, Raoul, théories stratégiques, Economica, 1996, t. VI, chap. I, II et III.

[2]  Castex, Raoul, théories stratégiques, Economica, 1996, t. VI.

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*